Numéro neuf
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Third : Comment le numérique nous divertit
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Third : Comment le numérique nous divertit
Olivier Babeau (OB) : J’ai la chance d’avoir un métier et non une profession, avec un parcours qui m’a toujours amené à réfléchir, ce qui permet de rester étudiant toute sa vie. Ayant beaucoup de mal à me cantonner à un seul champ disciplinaire, après mon école de commerce (l’ESCP), j’étais successivement élève à l’École normale supérieure de Cachan (aujourd’hui Paris-Saclay), agrégé d’économie-gestion et diplômé d’un DEA en philosophie à l’Université Paris-Sorbonne, avant de devenir professeur à l’Université de Bordeaux.
J’ai commencé rapidement à écrire des livres, qui permettent de dépasser les limites des articles scientifiques aux exigences épistémologiques très contraignantes. Je déplore d’ailleurs la spécialisation à outrance à l’université, qui vient à contre-courant de l’idéal du savoir universel, alors même qu’on devrait pouvoir regarder au-delà de sa discipline, voire de sa sous-discipline. Mes expériences en cabinet ministériel m’ont conduit à écrire L’horreur politique (2017) puis l’Éloge de l’hypocrisie (2018). En 2017, j’ai fondé l’institut Sapiens, un think tank dont la mission est de remettre l’humain au cœur du numérique. Étant peu technophile, j’ai toujours une fascination méfiante envers la technologie. Les nouvelles technologies transforment complètement notre monde et se sont imposées malgré nous. J’ai d’abord réfléchi sur la polarisation du monde avec des inégalités face au numérique dans Le nouveau désordre numérique : Comment le digital fait exploser les inégalités (2020).
Je me suis intéressé par la suite au temps libre avec La Tyrannie du Divertissement (2023), dont nous discutons aujourd’hui. Le loisir est une question sérieuse qui est encore trop souvent prise à la légère. Le détonateur de ce livre a été la mort de mon père, également universitaire, qui est décédé en travaillant, après avoir envoyé son dernier article scientifique.
La frontière entre le temps de loisir et le temps travail a toujours été ténue pour nous. Je suis mal à l’aise face à la distinction classique entre le travail (forcément aliénant) et le loisir (forcément émancipateur). Je préfère distinguer entre l’épanouissant et l’aliénant : la liberté n’a de sens que si elle est bien employée, autrement on retournerait au divertissement de Pascal qui nous détourne du but de notre existence.
OB : La genèse du loisir et du temps libre est un sujet passionnant qui a fait l’objet de beaucoup de travaux. La vie des hommes chasseurs-cueilleurs de la période du paléolithique était rythmée par 1 à 4 heures de travail quotidien dédiées à la chasse, avec des cycles de 4 ans entre chaque enfant pour pouvoir subvenir aux besoins. Les sociétés primaires sont des civilisations cruelles où le manque de ressources peut pousser à supprimer des bébés inaptes ou des personnes âgées trop malades, à l’image du Japon médiéval narré dans La balade de Narayama. En revanche, ces sociétés étaient relativement égalitaires avec peu de différences sociales. Ce sont les chefs qui travaillaient le plus, achetant leur pouvoir en vendant du travail. L’oisiveté générale ne signifie pas pour autant que le temps libre est à la libre disposition des individus. Paradoxalement, ce ne sont pas des lieux de liberté, avec du temps arbitrable dont on peut user comme l’on veut aujourd’hui. Comme le montre Claude Lévi-Strauss dans Tristes tropiques (1955), les sociétés primaires ne sont pas anomiques mais au contraire soumises à une extrême densité des règles qui gouvernent les individus.
Avec l’invention de la propriété à partir du néolithique, les inégalités entre classes sociales se sont creusées. C’est le pacte faustien avec l’agriculture où l’on a cru pouvoir acheter de la sécurité de l’approvisionnement mais qu’en échange, on multipliait les bouches à nourrir et devenait dépendants du travail manuel à maintenir. En 2000 ans d’histoire, il y a une très longue marche pour trouver du temps à soi. Si le Moyen Âge occidental est moins marqué par le travail en raison des nombreux jours fériés, le temps libre est encore dédié au collectif. L’Ancien Régime est également tributaire tant des rites de sociabilités dans la vie de la cour que de la vie collective des couches populaires. C’est à la révolution industrielle que le temps de travail a atteint des sommets inédits au détriment du temps libre.
À partir du XXe siècle, le temps de travail s’est réduit et l’espérance de vie progressivement élargie. Les progrès scientifiques ont permis de gagner au moins 3 ans d’espérance de vie par an en moyenne, alors que celle-ci était à environ 40 ans au début du siècle à cause de la mortalité infantile. La Troisième République puis la Libération permettent la généralisation des 35 heures pour les salariés, ainsi que l’instauration de plus de congés payés et d’une vraie retraite. Aujourd’hui, la retraite peut durer 20 à 30 ans, ce qui revient au tiers d’une vie humaine. C’est dans ce contexte d’accroissement du temps à soi que le divertissement à l’échelle individuelle a pris le plus d’ampleur.
OB : les autres, le temps pour soi et le temps hors de soi. Il faut distinguer trois usages du temps libre : le temps pour les autres, le temps pour soi et le temps hors de soi. Le temps pour les autres est le temps social. Ce temps était déterminant dans les sociétés anciennes, où la place de la vie collective ou courtisane était centrale. Aujourd’hui les jeunes ont moins de place à consacrer à ce temps, avec moins de relations amicales et sexuelles.
Le temps pour soi permet de travailler sur nous-mêmes. C’est la skholè, un terme grec qui renvoie à l’idéal du citoyen libre qui s’active à cultiver l’esprit tout autant que le corps. Avec une éducation qui rend le citoyen sage et éclairé, celui-ci connaît les auteurs, sait bien réfléchir et peut bien voter. Pour les Romains, le temps des affaires (negotium) est mal vu tandis que le temps pour soi (otium) est prisé. L’humanitas de Cicéron, c’est-à-dire ce qu’il faut savoir pour être vraiment un homme, n’est possible qu’avec le travail sur soi, en embrassant des activités qui aident à mieux nous connaître. Aujourd’hui, il faut tendre vers une skholè prise au sens large, comme toute activité qui nous améliore, nous émancipe, comme la lecture, la réflexion, la méditation, mais aussi les activités culturelles, sportives, artistiques.
Enfin, le temps hors de soi est celui qui nous amoindrit, qui nous rend passif et qui nous empêche de progresser. Dans Les pensées de Pascal, il s’agissait de façon radicale de tout ce qui nous détourne de Dieu, y compris l’art. Je pense qu’il faut garder l’essence de cette pensée en quittant sa dimension exclusivement religieuse : le divertissement, c’est finalement ce qui nous détourne notre épanouissement personnel et qui fait qu’on s’oublie.
Le problème n’est pas tant d’avoir un peu de délassement par le divertissement. L’enjeu est de maintenir un équilibre sain entre ces trois types de temps et de ne pas s’adonner à la tyrannie du divertissement. Contrairement aux deux autres catégories, le temps du divertissement a une puissance de séduction particulière qui tend à occuper une part trop importante de notre vie, et par conséquent à nous amener à nous perdre.
OB : Avec la massification du temps à soi très récente à l’échelle de l’histoire humaine, la question de la manière d’occuper ce temps libre devient essentielle. L’économiste Keynes a évoqué déjà au début du XXe siècle cet « effroi du temps libre » dans son essai intitulé Lettre à nos petits-enfants (1930), se montrant très critique contre les classes dominantes qui vivent dans le loisir, tel qu’il est décrit dans Le Portrait de Dorian Gray d’Oscar Wilde ou Du côté de chez Swann de Marcel Proust. La Première guerre mondiale a entraîné l’appauvrissement et la disparition d’une partie de la classe aisée qui vivait de sa rente et qui constituait une part infime de la population. Le vrai pouvoir bascule dès lors dans les mains de ceux qui travaillent le plus, sous la forme d’une ploutocratie. Les statistiques montrent que les classes supérieures et dominantes réalisent en pratique plus d’heures de travail que les plus pauvres.
La capacité de se freiner devant le divertissement facile est pour moi un mécanisme d’auto-défense complexe à acquérir. C’est là que se situe la source des inégalités dans la société d’aujourd’hui. Les biais qui poussent au divertissement facile sont semblables au shoot de dopamine que procure le sucre, qui active le mécanisme de récompense du cerveau. Il est plus difficile de mettre à distance le plaisir, non dans une perspective chrétienne comme chez Pascal qui considère que le plaisir nous éloigne de Dieu, mais selon moi en raison du fait que le plaisir authentique ne nous est positif que s’il est maîtrisé. C’est ce que Foucault appelait la discipline de soi par l’effort. On épargne en réalité ses efforts pour aboutir à des moments de plaisirs plus intenses. Je joue de plusieurs instruments comme le luth, le théorbe, le clavecin et cette pratique musicale m’a appris la discipline du travail pendant de nombreuses années avant de pouvoir en tirer un plaisir incommensurable. Le compositeur Erik Satie disait avec beaucoup d’humour que « Les pianos, c’est comme les chèques : ça ne fait plaisir qu’à ceux qui les touchent ».
Il y a une grande divergence dans la façon de savoir vivre ses loisirs. Les différences sociales ne tiennent pas forcément aux différences de richesses, puisque ceux qui réussissent le plus sont souvent enfants d’enseignants. Dans The Son Also Rises (2014), l’économiste Gregory Clark a montré que dans plusieurs pays comme l’Italie, la Suède, les Etats-Unis, la Chine ou la Pologne, on retrouve les mêmes familles dominantes dans les listes d’universitaires, de hauts fonctionnaires ou de professions libérales. Certains auteurs, comme Robert Plomin dans Blueprint : How DNA Makes Us Who We Are (2018), avancent même des explications génétiques pour expliquer la proximité de la personnalité des enfants avec leurs parents biologiques notamment lorsque l’on avance en âge. Il n’y a évidemment pas de déterminisme qui empêche une marge de progression. Mais les familles des catégories socioprofessionnelles supérieures et des professions intellectuelles ont une conscience plus aiguë du rôle du temps libre sur leur vie.
OB : Il faut se garder de tomber dans le biais qu’ont certains sociologues de considérer le travail sur soi et l’acquisition du savoir comme ayant pour seule finalité la domination. C’est le chemin qu’a emprunté Bourdieu. Certains auteurs se montrent d’emblée très critiques de la bourgeoisie en lisant tous les phénomènes sous le spectre d’un principe de domination. Or, une approche intéressante aurait été de faire l’effort de voir le monde selon la vision des bourgeois et de reconnaître la compétition sociale à laquelle ils sont soumis. Ces études conduisent souvent à la simple dénonciation d’un phénomène existant, sans construire une proposition alternative. Cela revient à la dénonciation non falsifiable ou non réfutable théorisée par Karl Popper.
Pour moi, le savoir n’est pas qu’un moyen de domination, qui permet certes une forme de sophistication individuelle qui nous permet de nous distinguer. Quand on est issu d’un milieu modeste et que l’on a accès à d’autres formes de productions culturelles, on vit certes dans un autre monde. Mais l’acquisition des savoirs n’est pas un instrument de séparation en soi, la sophistication développée ne répond surtout à notre souci d’amélioration de soi. Cicéron n’apprenait pas des choses pour se distinguer de ses esclaves ; il se distinguait d’eux parce qu’il apprenait. C’est quelque chose que l’on fait pour nous-mêmes, dans notre quête du bonheur. Il ne faut pas oublier que les êtres humains sont calibrés pour la compétition mais aussi pour la coopération, qui a permis notre survie. Nous sommes les survivants d’une lignée de personnes qui ont réussi à se reproduire, avec beaucoup d’efforts à la clé.
Dans une tribune intitulée Éloge de la bourgeoisie (2022) publiée au Figaro, j’ai pu défendre l’idée que la bourgeoisie travaille énormément et en tire sa fierté et sa légitimité. Les bourgeois ne sont pas suffisamment riches pour arrêter de travailler mais sont suffisamment riches pour la transmission, à l’image des familles d’avocats. Ils sont conscients du risque de déclassement et de tout l’enjeu de la transmission. Toutes les générations doivent alors travailler pour maintenir leur position sociale.
OB : La question de ce qu’est la culture générale est redoutable. Je ne me prononcerai pas sur un corpus type de culture générale qu’il faut avoir mais je pense qu’il est important d’avoir des notions de mythologie grecque ou de culture biblique qui permettent de mieux comprendre les œuvres d’art, au même titre que les œuvres modernes. Je trouve dommage notamment que l’on oublie l’héritage gréco-latin alors qu’autrefois un compositeur comme Hector Berlioz maîtrisait le grec. Il n’y a selon moi pas de risque d’homogénéisation culturelle, car chacun est libre de personnaliser sa culture.
Il est surtout important de développer un goût pour le savoir et la lecture. Le vrai risque est un arrêt de cet apprentissage permanent lorsque l’on entre dans la vie professionnelle, faute de temps. Je suis le premier à me rendre de compte que le temps m’échappe de cette façon. On devient plus facilement dépendant des écrans et des réseaux sociaux dans cette époque du numérique. À ce sujet, je conseille vivement la lecture du livre The Shallows : What the Internet Is Doing to Our Brains de Nicolas Carr qui décortique les enjeux cognitifs dans notre monde dominé par le numérique.
Il faut au contraire un travail sur soi pour se remettre à la lecture, qui procure des bienfaits pour la mémoire à long terme qu’on ne retrouve pas lorsqu’on est face à un écran. On lit car on apprend des choses sur soi, pour être présent au monde et avec les autres. Lorsque mes enfants s’ennuient, je leur conseille de prendre un livre et lire, comme ce que mon père m’a conseillé quand j’étais plus jeune. Le souci de la transmission du savoir ne doit pas être vu comme un péché originel tel qu’il est décrit par certains sociologues comme Bourdieu. On ne peut empêcher les parents de faire de leur mieux pour que les enfants aient toutes les chances de leur côté.
OB : Le rôle des parents est primordial car en fin de compte l’enfant ne passe qu’une très faible partie de son temps éveillé à l’école. Or plus on descend en échelle sociale, moins on est conscient de l’importance de travailler sur soi. Les temps d’exposition aux écrans sont multipliés et les programmes diffusés sont plutôt médiocres, ce qui ralentit considérablement l’acquisition du langage chez les jeunes enfants. On estime que les enfants les plus exposés aux écrans arrivent à l’école qu’avec 200 mots de vocabulaire, contre 1400 à 1800 mots pour les enfants dont les parents sont plus concernés. Pour éviter les risques de dépendance, il ne devrait pas avoir d’écran à proximité de l’enfant avant ses 3 ans, même pour les tablettes éducatives. Il faudrait introduire l’écran petit à petit et garder son usage toujours sous un créneau limité. Je ne suis pas dans un combat des Anciens contre les Modernes, mais dans un souci de la culture contre l’absence de culture. À l’heure où l’on est à un clic de distance d’une infinité de sources de divertissement, il faut mettre à la portée des enfants la découverte des choses les plus variées possible. Les goûts s’acquièrent et se construisent avec le temps. À notre époque du règne du loisir, on a du mal à associer notre temps libre à un temps d’effort, puisque le travail est associé à la souffrance. Il reste certes des poches de résistances dans les loisirs compétitifs comme le sport ou les jeux vidéo. Mais en général le loisir est associé au relâchement de sorte qu’on tend vers des loisirs vides et médiocres. Or, il faut parvenir à l’encouragement de l’effort et la mise à distance de ce type de loisir.
Le véritable problème reste la passivité, en scrollant les vidéos à l’infini par exemple. C’est en faisant nous-mêmes l’effort qu’on transmet le goût des choses sans le savoir. Je monte une chaîne Youtube avec mes enfants en ce moment pour leur montrer que le montage d’une vidéo Youtube demande en réalité beaucoup de travail. De même, en écoutant de la musique, on peut apprendre à reconnaître les patterns mélodiques et à se renseigner sur les étapes de la production. J’encourage ainsi mes enfants à poursuivre ce qui les intéresse en allant jusqu’au bout, en posant sans cesse des questions. Mes fils se sont construit une culture footballistique qui leur permet de comprendre des tableaux très austères et de parfaire leurs connaissances géographiques. L’exemple est la clé de l’éducation. Les enfants sont influencés par les parents et tentés par l’imitation. Il y a certes une part d’influence de la génétique, mais il y a toujours de la place pour les génies exceptionnels comme le montrent avec brio l’écrivain Édouard Louis, auteur d’En finir avec Eddy Bellegueule (2014) ou mon collègue et ami et sociologue Gérald Bronner dans Les origines (2023).
OB : Notre époque souffre de l’échec complet de la démocratisation de la culture, qui était voulue par André Malraux avec les politiques culturelles d’après-guerre. Les politiques culturelles sont désertées par la gauche et le loisir de se former ou se cultiver n’est plus un élément politique correct. Pour les classes populaires, la difficulté est que plus l’on descend dans l’échelle sociale, moins on a de leviers pour le travail sur soi. Il ne reste plus que les politiques sociales et culturelles de l’État, qui peuvent bien fonctionner dans un pays avec beaucoup de transferts sociaux comme en France, mais pas toujours dans des pays moins interventionnistes comme les Etats-Unis, qui privilégient la privatisation et l’entertainment. Le réseau Public Broadcasting Service (PBS) constitue une sorte d’équivalent à nos médias de service public comme notre chaîne Arte, mais le budget public n’est pas du tout le même. Il serait souhaitable de travailler l’incitation par des politiques culturelles. J’ai pu proposer à l’Elysée l’idée d’un culture score, à l’image du NutriScore proposé pour l’alimentation, qui serait associé aux œuvres promues par la politique culturelle.
Au-delà du rôle des parents, il faut quand même s’en remettre à l’école. Mais j’en veux à l’école d’avoir abandonné l’idée d’hiérarchie et d’excellence par crainte des accusations de discrimination autour de la stigmatisation de l’ignorance. Un enfant fort en thème se fait aujourd’hui bizuter. L’école ne distingue plus les gens qui auraient pu être distingués. L’institution valorise aujourd’hui une conformité autour d’un catéchisme de valeurs inclusives, qui passe à côté du savoir. L’école devient ainsi plus inégalitaire et ne permet plus aux personnes venant de familles très modestes de réussir. Les favorisés et les défavorisés restent chacun à leur place, sans que ces derniers ne puissent arriver à un statut de trans classes comme l’a théorisé Chantal Jaquet.
Or l’éducation nationale devrait rester le lieu de transmission de la curiosité et du savoir. Montaigne disait qu’« éduquer, ce n’est pas remplir des vases mais c’est allumer des feux ». Il faut se rappeler que l’école est une chance et encourager les enfants à aimer apprendre. Mais comment assurer cette mission alors que les professeurs sont très mal payés et ne sont plus forcément les meilleurs éléments ? Des instituteurs qui sont les hussards de la Républiques, les professeurs sont devenus des prolétaires de l’État. Ils sont démotivés par les conditions difficiles de travail et n’arrivent plus toujours à transmettre l’exaltation de la découverte du savoir. Enfin, on est devenu dépendant des tests qui vérifient l’acquisition de savoir en perdant le plaisir de la skholè. Il faudrait empêcher l’obsession de la productivité du monde de l’entreprise d’envahir l’espace scolaire. Il est important aussi d’améliorer le salaire des professeurs, de rendre le métier plus attractif pour retrouver le dévouement et la disponibilité qu’avaient autrefois les instituteurs.
Nous sommes ravis d’avoir pu échanger avec Olivier Babeau, qui invite nos lecteurs à questionner leur rapport au temps (temps social, temps pour soi et temps hors de soi) et attire leur attention sur l’importance du travail sur soi. Une analyse intéressante sur ce qui constituerait le « mauvais divertissement » à l’ère numérique.