third
Mai 2018

Numéro Zéro

Retrouvez le numéro zéro de Third : La plateforme, clé de voûte de la révolution numérique.

sommaire
Third | Mai 2018

Mise en relation des utilisateurs et droit de la consommation : vers une redéfinition des contours de la relation professionnel-consommateur ?

L’économie numérique et le droit de la consommation interagissent de manière bien particulière. parmi les corps de règles qui concernent cette nouvelle économie, le droit de la consommation occupe une place de choix.

 

Quelles règles s’appliquent aux relations entre offreurs et demandeurs sur une plateforme numérique ? quel est le statut du demandeur et de l’offreur sur la plateforme ? à partir de quand parle-t-on d’un professionnel ?

Toutes ces questions irriguent les réflexions des entrepreneurs du secteur, des utilisateurs et plus généralement de toutes les parties prenantes au développement de l’économie numérique en France (citoyens, investisseurs et institutionnels). Elles reposent sur la difficile ligne à tracer entre activité occasionnelle ou privée et une activité récurrente exercée pour les besoins d’une activité libérale ou commerciale.

Pour y répondre, le juriste n’est pas désarmé, bien que certaines règles méritent d’être précisées ou sont actuellement sujettes à évolution.

Quelles sont les règles issues du droit de la consommation qui s’appliquent aux relations entre offreur et demandeur sur une plateforme numérique ?

De manière générale, le droit de la consommation s’applique aux relations entre professionnels et consommateurs ou non professionnels, le postulat de départ étant qu’elles sont déséquilibrées et qu’il convient de mettre à la charge des professionnels un certain nombre d’obligations pour corriger ce déséquilibre et garantir des droits au
bénéfice de leurs contreparties.

À titre d’exemple, le professionnel est tenu à des obligations d’information renforcées, le consommateur bénéficie d’un droit de rétractation ou encore il est fait interdiction d’avoir recours à des clauses abusives.

L’applicabilité de ces règles dans l’économie numérique est intéressante puisqu’elle dépend du statut (ou de la « qualité ») de chaque partie :

‒ si l’offreur de biens/services est professionnel et que le demandeur est un particulier, alors les règles du droit de la consommation devraient s’appliquer et gouverner leur relation.

‒ si l’offreur et le demandeur sont tous deux consommateurs ou tous deux professionnels, alors les règles du droit de la consommation s’appliquent a priori pas.

‒ si l’offreur est un particulier mais qu’il a une activité pouvant être requalifiée de professionnelle, les frontières se mélangent.

C’est dire si l’identification du statut de chaque partie aux transactions dans l’économie numérique est un enjeu central. Le Conseil National de la Consommation (CNC) ne s’y est pas trompé en rendant au mois de janvier 2016 un avis sur les plateformes numériques qui formule la recommandation de faire figurer sur les plateformes le statut de l’offreur afin de donner davantage de lisibilité quant aux règles applicables à la transaction.

Cette proposition s’est concrétisée avec l’obligation pour les plateformes de mise en relation, depuis janvier 2018, d’identifier les offreurs professionnels, consommateurs ou non-professionnels selon la qualité déclarée par ceux-ci.

Quel est le statut du demandeur et de l’offreur sur la plateforme ? A partir de quand parle-t-on d’un professionnel ?

Le Code de la consommation tel que modifié en 2016 par la Loi Hamon définit le professionnel comme « toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui agit à des fins entrant dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole ».

Cette définition légale est complétée par une jurisprudence fournie qui considère qu’est un professionnel celui qui réalise des transactions à titre habituel et dans le but de réaliser un profit.

La ligne de démarcation entre le particulier et le professionnel sur une plateforme de mise en relation peut être très floue : c’est d’ailleurs le constat sur lequel se sont fondés les décrets d’application de la Loi pour une République Numérique (dite « Lemaire ») en vigueur depuis le 1er janvier 2018 puisque l’obligation pour les plateformes d’identifier les professionnels s’arrête aux déclarations effectuées par les utilisateurs au moment de leur inscription.

Pourtant, distinguer clairement le professionnel du particulier permettrait de sécuriser la situation juridique des plateformes et des utilisateurs.

Devant la complexité de la tâche, une approche par seuil pourrait être pertinente : en-deçà d’une certaine somme perçue par le biais d’une plateforme d’intermédiation, les revenus perçus seraient exonérés d’imposition et les personnes ayant perçu ces sommes seraient exonérées de cotisations sociales dans la mesure où les activités ainsi réalisées seraient considérées comme purement privées et ne relevant pas d’une activité commerciale. Cependant, dans cette vision, la question pratique de la réconciliation des informations pour chaque individu semble particulièrement ardue sauf à mettre en place un système centralisant l’ensemble des informations ou à considérer que l’appréciation du seuil doit se faire plateforme par plateforme.

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