Best of - Numéro dix
Retrouvez le numéro dix de
Third : Un monde nouveau
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Brigitte Séroussi (BS) : pour rappel, Mon Espace Santé (MES) est un outil d’État, porté par le Ministère de la Santé et l’Assurance Maladie.
L’objectif premier de MES est de permettre au patient d’être acteur de sa santé et en contrôle de ses données de santé. Ce carnet de santé électronique permet en effet de :
Le second objectif de MES est de permettre le partage d’informations de santé entre les professionnels de santé participant à la prise en charge d’un patient afin de favoriser la coordination et la continuité des soins. Pour cela, il est important que le dossier médical du patient soit alimenté. C’était notamment l’objectif premier du DMP Dossier Médical Partagé (DMP) qui est l’une des pierres angulaires de MES : améliorer la prise en charge par l’information utile à la prise en charge du patient.
Dans cette optique, grâce à un investissement inédit de 2 milliards d’euros, le Ségur du numérique en santé a été mis en place. Il s’agit d’un programme dont l’ambition est de « généraliser le partage fluide et sécurisé de données de santé, entre professionnels de santé et avec les usagers afin de mieux soigner et mieux accompagner ».
Dans le cadre de ce programme, un travail a été conduit avec d’une part les professionnels de santé afin de recueillir leurs besoins et les éditeurs du numérique en santé afin de faire évoluer les logiciels métiers dans l’objectif d’alimenter le Dossier médical de MES de façon ergonomique et sécurisée.
BS : on parle ici de la reprise d’antériorité. Aujourd’hui nous ne sommes pas encore au clair sur les responsables de cette reprise d’antériorité, même si certains établissements de santé se sont d’ores et déjà engagés dans cette activité. En revanche, le patient s’il a les documents papier, peut les prendre en photos et les intégrer directement dans son espace santé.
BS : il faut faire la différence entre l’activation de MES, l’alimentation et l’utilisation des éléments d’information de MES par les professionnels de santé pour la qualité des soins. Quand les citoyens ont été sollicités pour l’activation de leur espace santé, il y avait trois attitudes différentes :
Le démarrage de MES a été poussif, avec un taux d’activation non satisfaisant. Mais on constate aujourd’hui à la fois une accélération de l’activation des espaces santé et une accélération de l’alimentation (un document médical sur deux créés aujourd’hui est poussé dans MES, un résultat du Ségur du numérique en santé). Cette accélération s’observe plus particulièrement chez les personnes âgées et les enfants. Un programme ambassadeur a par ailleurs été mis en place afin d’augmenter ce taux d’activation.
BS : il existe au niveau du Ministère de la Santé une cellule de l’éthique du numérique en santé qui produit des référentiels ayant vocation à être opposables aux éditeurs de solutions numériques en santé.
Avant 2023, il existait déjà des référentiels de sécurité et d’interopérabilité opposables aux éditeurs. Un référentiel éthique a été ajouté par la Loi de Financement de la Sécurité Sociale de 2023.
La cellule de l’éthique en santé a construit différents types de référentiels :
Avant la construction du référentiel de l’IA en santé, il existait déjà un guide de bonnes pratiques pour introduire l’éthique dans les solutions d’IA en santé dans le cadrage, le recueil des données, la séparation des échantillons et la préparation de la mise sur le marché, avec pour chaque étape des recommandations.
Le référentiel de l’éthique de l’IA en santé regroupe une quarantaine de critères :
BS : l’IA générative est utile pour les personnes connaissant les réponses aux questions qu’elles posent. En effet, le principe fondamental de l’IA générative est de retranscrire ce qui a été déjà dit.
Or en médecine, tous les patients sont singuliers. Ce qui a été dit pour un patient ne fonctionnera donc pas systématiquement pour un autre. Donc ce n’est pas fiable.
Cette caractéristique délimite des zones d’utilisation de l’IA générative en médecine. Aujourd’hui on l’utilise principalement dans la rédaction de synthèses, la préparation de cours etc. Il reste important de toujours procéder à une étape de vérification.
BS : Les performances de l’IA générative pour l’aide à la prise de décision médicale tournent autour de 60% à 70% de réussite et sont donc insuffisantes. Il reste néanmoins toujours intéressant de tester ce que nous dit l’IA générative sur un cas clinique.
En revanche l’utilisation d’outils type ChatGPT (ou tout autre large language model) étranger, notamment américain ou chinois, est à proscrire sur des cas cliniques avec données personnelles car elle pourrait entrainer une fuite de données. Une publication a notamment démontré qu’il était possible de récupérer des données d’apprentissage nominatives en posant certaines questions à ChatGPT, sans avoir une connaissance préalable de ces données d’apprentissage2. Il est donc conseillé de remplacer l’utilisation de ces outils par l’installation de large language model en local.
1. https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000048276454. (Retour au texte 1)
2. Scalable Extraction of Training Data from (Production) Language Models (https://arxiv.org/abs/2311.17035). (Retour au texte 2)